
Project 21
Boucle à glissière (Tuck buckle) MING
Réserve de marche: 38 h, 21600 alt/h
En 2023, la Marque MING a organisé un dîner mémorable à Singapour avec nos collectionneurs où le fondateur, Ming Thein (MT), s’est vu proposer un défi : à quoi ressemblerait une montre conçue et pensée entièrement pour lui-même, dans les limites du réalisable, mais sans contraintes ? Est-ce qu’un défi de la sorte pourrait être relevé ? Et ferait-il une édition pour les collectionneurs présents au dîner ?
À première vue, c’était une question étrange car le premier filtre chez MING est que nous devons aimer tout ce que nous créons. Cependant, il y a des considérations commerciales qui doivent être prises en compte – par exemple, il serait impossible d’avoir un mouvement sur mesure, extra-plat et fini à la main dans une pièce d’entrée de gamme.
MT ajoute également : « Une partie importante du processus de conception est l’expérimentation : même si cela s’avère peu pratique ou impossible, il est important de repousser les limites et de se poser la question « et si ? ». Le “cool“ même s’il paraît impossible n’en reste pas moins “cool“. Il y a des designs qui sont cool mais qui n’ont peutêtre pas de sens du point de vue commercial – ils sont généralement trop particuliers ou originaux – mais personnellement ils me plaisent beaucoup ».
Alors, comment a-t-il répondu au défi posé lors de ce dîner ? « Sachant que je devrai inévitablement m’adapter aux lois de la physique et de la fabrication, j’ai décidé de viser les étoiles et de voir où nous atterririons », dit MT. Comme cela signifiait un nombre potentiellement inconnu de changements, nous n’avions aucun moyen de présenter une conception définitive avant de demander l’engagement de nos collectionneurs, et pourtant, pour que le projet puisse aller de l’avant, il nous fallait un certain engagement pour couvrir les aspects économiques fondamentaux.
Ainsi, dix âmes courageuses nous ont fait confiance et se sont engagées dans un « omakase » horloger : une montre avec un prix plafond, une date de livraison estimée et un mouvement complètement nouveau pour nous, mais aucun autre détail ne leur a été fourni.
Le Frederic Piguet 21, un mouvement important du point de vue horloger avec une histoire bien distincte : d’une épaisseur de seulement 1,75 mm, il fut l’un des mouvements les plus fins jamais réalisés et l’un des plus longtemps produits, ceci depuis son introduction en 1925 (il y a exactement 100 ans) jusqu’à l’intégration de F. Piguet dans le Swatch Group. Presque toute l’industrie a utilisé ce produit et ses dérivés, notamment Patek, AP, VC, JLC, IWC, Blancpain, Cartier. Et il fait partie des mouvements que MT aurait depuis longtemps voulu utiliser afin de créer une montre.
Un petit mouvement n’a de sens que dans une montre taillée proportionnellement – et bien que MT ait toujours préconisé la portabilité et la taille visuelle plutôt que la taille physique, quelque chose d’encore plus petit que nos 38 mm habituels constituerait de facto une pièce de niche. « Je me suis fixé à 35mm – au seuil de la modernité, avec une touche vintage claire. Je voulais qu’elle fasse plus large au poignet, une grande ouverture, ce qui est le cas grâce à une lunette étroite et des index et éléments de cadran poussés jusqu’à l’extrémité extérieure. Il fallait qu’elle soit fine, pour être en parfait harmonie avec le mouvement. Et il fallait bien entendu la construire selon les normes modernes – étanchéité à 50 m et bonne rigidité en torsion », ajoute MT.
Nous sommes fiers que la réflexion ait été guidée dans les moindres détails. Selon MT, « [Project 21] ne serait pas une MING si nous n’en demandions pas plus : les petits boîtiers ont tendance à être légers, ou encore pires perçus comme ultralégers au point de créer une dissonance cognitive – nous avons également tendance à les pressentir comme fragiles. J’ai donc conçu un boîtier qui serait aussi lourd que possible : massif tout autour du mouvement avec une lunette ne faisant qu’un avec la carrure. Ceci pour une rigidité perçue encore plus élevée. Je voulais qu’il soit fabriqué en tantale, matériaux dense et exotique, avec trois finitions contrastées : un poli miroir sur le rehaut, un brossé circulaire fin sur la partie concave de la lunette, qui s’étire jusqu’au sommet des cornes, puis un sablage sur les flancs de la carrure qui s’écoule continuellement vers le bas. »
Il poursuit : « Il n’y a qu’une seule ligne dure dans le corps du boîtier proprement dit : le bord entre les surfaces supérieure et latérale. Chaque autre profil est courbé dans au moins une direction, parfois deux. Et le fond n’est même pas circulaire, mais il a une protubérance trapézoïdale arrondie pour permettre un dégagement autour du tube de couronne. »
Le design combiné avec les tolérances requises des boîtiers ainsi que le choix du tantale a représenté un cauchemar d’usinage, uniquement possible en multiaxes et exigeant certains des meilleurs talents actuels de fabrication et d’usinage. Cette impossibilité perceptible de production de la boîte a été l’une des nombreuses raisons pour lesquelles nous n’avons jamais sérieusement envisagé de produire le Project 21 plus tôt.
Si vous avez suivi nos exploits avec l’Alternative Horological Alliance (AHA) et aperçu le bracelet en tantale, vous devinerez probablement qui a donné vie à la vision de MT : Joshua Shapiro, co-fondateur d’AHA, horloger et expert en usinage. Le boîtier du Project 21 est entièrement produit et terminé par Josh et son équipe à Los Angeles. Cette boîte en tantale est un chef-d’oeuvre d’usinage, qui s’étend jusqu’au détail des multiples finitions sur la couronne de 3,5 mm de diamètre.
A Josh d’ajouter : « L’usinage du tantale présente toujours des défis, et le design de Ming est toujours éloquent mais difficile. Nous avons été extrêmement satisfaits du résultat malgré les difficultés et sommes persuadés qu’un boîtier en tantale comme celui-ci n’a jamais été fait auparavant ».
Cependant MT ne s’est pas arrêté avec le boîtier – « Un projet si spécial signifiait que nous devions être encore plus exigeants. La Façon dont j’ai abordé le calibre 21 de Frédéric Piguet a consisté à retravailler complètement ce mouvement vintage avec de nouveaux ponts, dont un en titane assorti à la couleur du cadran, squeletté pour mettre en valeur le train d’engrenages et orné de rubis sertis dans des chatons. » Nous avons fait équipe avec TitAl SA et Mathis Horlogerie pour ces importants changements. Tous les autres ponts arborent un sablage poli et fin, en clin d’oeil à la finition utilisée sur nos autres mouvements. Un défi passionnant et à la fois intimidant pour tous les partenaires impliqués.
Le côté cadran est tout aussi spécial : bien qu’extra-plat, le Project 21 possède deux cadrans : le premier comporte un motif multicouche de virures contraintes dans une couche de borosilicate fusionnée, qui a été produit par notre partenaire FEMTOprint. Il est suspendu au-dessus d’une plaque de laiton qui ne fait que 400 microns d’épaisseur et qui est revêtue d’un traitement CVD, mais qui parvient à intégrer un fraisage qui fait écho au motif du cadran du dessus. Les indices sont gravés dans la glace saphir de la boîte, et les aiguilles squelettées ont des flancs polis et angulaires. En raison de la finesse de ce modèle et du l’intention thématique il n’y a pas de matériau lumineux, faisant du Project 21 une des très rares montres que nous avons produites et qui ne luit pas dans la nuit.
« J’ai toujours cherché l’équilibre dans le design et la Project 21 en est peut-être l’expression la plus fine à ce jour. Elle est visuellement fine et raffinée, mais tactilement robuste et lourde ; elle donne l’impression d’être petite mais fait plus large au porté; elle semble vintage tout en ayant des codes de conception et des formes complètement modernes qui ne sont possibles qu’avec les technologies actuelle. » , conclut MT.